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28 novembre 2016

« C’est une question de réalisme.

« C’est une question de réalisme. » « Je me base sur le monde réel » Arguments souvent utilisés pour expliquer pourquoi nos jeux perpétuent un paquet d’horribles discriminations : misogynie, sexisme, machisme, racisme, ethnocentrisme, discriminations basées sur l’âge, l’identité de genre ou le handicap, …

Qu’est-ce que cela implique ? Que toutes les personnes qui sont sujettes à ces douloureuses discrimination dans le monde réel retrouveront ces injustices dans leur loisir.

Pourquoi faire cela ? Une fois qu'on en est conscient, pourquoi faire cela ?

25 commentaires:

  1. Par médiocrité? Ou par inconscience? Et plus rarement par méchanceté? Et parfois pour mieux les dénoncer, aussi.

    Tu sais quoi, l'ami? Faudrait faire une espèce de checklist qui permet à un designer de déterminer si son jeu/scénar/film/whatever tombe dans un de ces travers. On l'appellerait Lisa, l'échelle de Gherartd*.

    *Dsl, j'ai pas réussi à être sérieux jusqu'au bout... ;)

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  2. Quand on te donne un critère, c'est toujours très intéressant de voir quand il est appliqué ou pas.

    Ici, c'est marrant de voir quand une personne se justifie par "c'est réaliste" ou par "oui mais c'est un jeu au bout d'un temps, faut bien qu'on s'amuse." Et généralement ça donne :

    °On ne peut pas jouer une femme chevalier : "c'est réaliste".

    °Mais on peut lancer des sorts : "c'est un jeu, faut bien qu'on s'amuse".

    Y'a des moments où on s'embarrasse pas de réalisme : quand ça arrange le hard core.

    Je crois qu'au bout d'un temps faut pas confondre les excuses et les raisons. Les excuses c'est ce qu'on dit. Les raisons c'est ce qu'on fait. Et quand tu as des gens à qui tu dis "ah non, c'est du med-fan, pas de femme, pas d'étrangers, pas d'handics, mais les dragons et les fées aucun souci" et qu'ils ne viennent pas jouer, ce que tu fais, c'est exclure des gens.

    Après on peut avoir ses raisons et assumer ou pas. Mais c'est ce qui se passe.

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  3. Par manque d'imagination ?
    Pour avoir une "pseudocaution scientifique" à opposer à choix arbitraire pas assumé ?
    Parce tout le monde n'est pas humaniste ?

    Dans tous les cas, pour moi et mon avis ne vaut pas grand chose, à chaque qu'on parle de réalisme dans un jeu de rôle on va droit dans le mur.
    Et pas qu'en jeux de rôle d'ailleurs... le réalisme n'a rien à voir avec la fiction.
    Je préfère de loin la notion de vraisemblance.
    Pour faire dans le simpliste :
    pour moi le "réalisme" essaie de faire entrer du réel au pied de biche dans une fiction.
    Alors que la vraisemblance nous présente la fiction de manière à nous faire croire (ou nous donner envie de croire) qu'elle est vraie.
    Je ne sais pas si je vais dans le sens de la question... tant pis...

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  4. Je me dis qu'il y a un paquet de jeu à essayer et un grand nombre de joueurs / joueuses potentiels. Pourquoi s'entêter à jouer à des jeux / avec des tables qui véhiculent ce genre d'idée ?

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  5. Tout à fait Matthieu, le réalisme est une chimère. J'avais écrit une demi-page sur ce marronnier avant de l'effacer car même si c'est pertinent ce n'est pas nécessaire à mon propos.

    Et j'ai envie que le plus grand nombre de personnes puissent jouer avec plaisir au plus grand nombre de jeux, sans restrictions inutiles. Donc de faire bouger les choses, pour que cette erreur commise par manque d'information le soit moins.

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  6. En tout cas, j'aime beaucoup l'idée de tes aides jeu pour PNJ.

    Ma position sur le sujet : on est souvent limité par manque d'imagination et par son propre milieu social. Donc, même si le joueur débutant blanc mâle occidental n'est pas misogyne / xénophobe , il aura plus facilement accès une visualisation d'un homme moyen, plus ou moins de son âge, de la même couleur, sans handicape, etc..

    D'où la pertinence de tes fiches. Ou de tables aléatoires, dont j'use et j'abuse depuis que j'ai compris (récemment) qu'elles n'étaient pas là pour brider mes jeux, mais au contraire pour les enrichir de mille façons.

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  7. Merci 😀 Les tables aléatoires cela fonctionne très bien aussi, je vais d'ailleurs ajouter cela à la prochaine version.

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  8. J'ai aussi l'impression que souvent, lorsqu'on n'a jamais subi de discriminations, il est difficile de réaliser qu'on les perpétue involontairement.
    Et du coup, par culpabilité et parce qu'étant quelqu'un de bien on refuse d'admettre qu'on peut malgré tout avoir un propos discriminant, on essaie de se trouver des excuses, au lieu de dire "merde, je m'en étais pas rendu compte, mea culpa, joue ta femme chevalier, t'as raison, on s'en fout, c'est qu'un jeu, pas une thèse d'histoire ou de socio".

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  9. C'est exactement comme cela que je perçois les choses, Khelren :)

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  10. Je suis assez d'accord avec la vision de Tiburce Guyard souvent, il suffit de souligner le trait pour que la personne s'en rendent compte, et sinon, on a toujours la possibilité de choisir ses joueurs.
    Moi je suis basique : "Ah bon ? on peut pas jouer de nana à Wasburg ? ben je joue pas..."
    Au final j'ai joué une femme garde sans soucis :)

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  11. Il ne faut jamais oublier que le jeu est une activité de plaisir, ça doit donc être le plaisir de tout le monde autour de la table, et ça passe bien avant la réalité. En plus, la réalité, on se la tape déjà tous les jours, et c'est bien assez.

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  12. Le réalisme peut aussi vouloir dire autre chose : ça existe dans la réalité et cela m'intéresse d'aborder cette problématique au travers du JDR. J'ai un attachement aux problématiques du réel qui me touchent particulièrement même si je peux comprendre (et apprécier) l'idée d'une partie de JDR comme occasion d'explorer des utopies (il est parfaitement légitime, à un instant T, de ne pas avoir envie de jouer autour d'une problématique donnée).

    Il y a, je trouve, un paradoxe à s'intéresser autant aux questions du genre et à vouloir les neutraliser autour de la table de jeu. En tous cas à titre personnel le sujet m'intéresse trop pour que je l'évacue dans toutes mes parties.
    C'est à mon sens une grande limite des approches quantitatives du problème qui posent comme seul horizon souhaitable de notre loisir des histoires où le genre n'aurait aucune importance.

    Je viens de recevoir War Birds, série de JDR/GN autour de personnages féminins pendant la seconde guerre mondiale, qui fait le choix d'aborder frontalement (et à mon avis intelligent) la question du sexisme et si je le confrontais à ta mesure je me retrouverait à le juger extrêmement sévèrement (on pourrait aussi citer les jeux de la récente anthologie Feminism, Saga of the Icelander et sa carac "Gender", Kagemastu, etc etc).

    Par contre je trouve beaucoup plus important d'interroger, non pas ce qui est raconté dans la fiction, mais d'abord ce qui se déroule autour de la table. Est-ce que les rapports de domination de l'univers fictif viennent rendre déplaisant l'expérience du joueur incarnant une femme/un noir/un homosexuel en le soumettant à des contraintes voire à des brimades trop importantes ?

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  13. Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas de "bonne réponse" à la question "pourquoi faire cela", et je suis content de pouvoir le dire :D

    Pourquoi faire cela ?

    Qu’est-ce que ces discriminations apportent ou permettent ? Comment le jeu utilise-t-il ce choix de conception ? Pour quoi faire ? Malheureusement les réponses réelles sont souvent peu flatteuses. Mais il y a aussi des jeux comme Night Witches, les anthologie War Birds ou #Feminism , ...

    Par ailleurs, il y a la motivation du jeu historique. Alors le jeu doit réellement explorer, exploiter, cette historicité. Car si c’est uniquement pour en faire une toile de fond cool, on revient à la discrimination gratuite, faussement justifiée. Pour assumer vraiment cette optique, le jeu devrait à mon sens se baser sur des études historiques récentes, à jour, sur la réalité historique telle qu’on la devine aujourd’hui. Pas sur les clichés des médias. Ou sur les échos des études anciennes, qui comme toute étude montre le passé par le prisme de l’époque de l’étude (où, par exemple, on n’a jamais vu les preuves de l’existence des guerrières viking simplement parce que si l’on trouvait des restes de personne en arme, c’était UN guerrier, sans le vérifier anatomiquement). Sinon, retour à la toile de fond cool, retour à la discrimination gratuite.

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  14. J'avoue que l'argument général "la réalité on se la tape au quotidien donc pas en jeu etc." me laisse assez froid. Le jeu ne se veut pas réaliste par nature mais il emprunte toujours à la réalité.

    Après il y a le choix particulier du joueur ou de la joueuse, et ça c'est différent. Le choix d'une joueuse qui n'a pas envie que son perso soit victime de harcèlement doit être respecté, justement au nom de son plaisir.

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  15. Une des premières fois ou j’ai tenté de jouer une femme sur un jeu med-fan , mes camarades (joueurs) ont fortement suggérés que je couche avec un capitaine de bateau en guise de paiement pour la traversée.
    Lors d’un de mes passages en club, j’ai entendu une bande déblatérer hors jeu de la gente féminine avec des termes en ‘asses’ au point que je quitte la pièce.
    Une ou deux fois j’ai vu un joueur incarner un personnage d’une ethnie différente avec des accents et des clichés à la Michel Lebb
    Ce sont les jeux ou les tables qui perpétuent les discriminations?

    Je ne nie pas que le jdr en tant qu'activité sociale, se doit d’être exemplaire. Pourtant, éduquer une table ou des lecteurs peut se faire sans bannir “la peur de l’autre/ de la différence” d’un univers/ d’une proposition de jeu.
    Si on met cela ‘sous cloche’ comme si on en niait l’existence,  tous les jeux en deviendraient utopiques ou manichéens.
    “Je te tends la main, quelque soit ton sexe, ton orientation et ton origine, joins toi à moi et ensemble allons casser du gobelin. “
    A ce prix la, autant condamner la violence qui, lorsqu’elle n’est pas glorifiée, est traitée comme une formalité digne d’un GTA.

    De base le contrat social est la pour éviter d'aborder certaines choses bien au delà des discriminations citées (genre l’esclavage, la torture, j’en passe et des meilleures).
    Quand le propos du jeu ne vous a pas déjà fait conclure que “c’est pas notre came”. (Je ne conseillerai pas Poison’d ou Dog Eat Dog à tout le monde…)

    Par exemple la ré-écriture de Monsterhearts par son désir d’ouverture et d’inclusion, a de quoi mettre du plomb dans l’aile de ce jeu initialement gritty et Pvp…
    Quand on s'attable à ce genre de jeu on est la pour explorer les thèmes abordés... On doit s'attendre à ce que le rejet de l'autre se manifeste.
    Or il va de soit que les horreurs qu’on va proférer sur un jet de rembarrer ne doivent blesser personne à la table et ne reflète pas nos propres convictions.

    Je me fais ici l’avocat du diable uniquement pour éviter une sorte de chasse aux sorcières systématique. Je ne condamne pas non plus les jeux optimistes et safes, heureusement qu’ils existent.
     Mais je pense que certains jeux gritty ont besoin de refléter l’horreur humaine pour être crédible.
    Night Witches brille lorsqu'on incarne fièrement une femme dans un milieu machiste.
    Et ça ne m’empêche pas de  réprimer une grimace lors de certains des arguments de Gamefu autour du one%-gate.

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  16. Ici je parle bien des jeux tels que proposés par leurs autrices et auteurs. Ce qu'en font les joueuses et joueurs est une toute autre histoire, mais si le jeu évite déjà de tomber de le piège, que ce soit de manière explicite ou implicite, c'est déjà très bien.

    Il n'est pas question de ne faire que des jeux utopiques et/ou manichéens. Je ne penses pas avoir écrit cela. Beaucoup d'autres problématiques peuvent être abordées (relations humaines, justice, enquêtes, crimes, guerres, découvertes, catastrophes, richesses et pauvreté, mystères, quêtes, survie, honneur... la liste est infinie), et les questions de discrimination peuvent être abordées volontairement, traitées avec soin, plutôt que d'être reproduite aveuglément par habitude.

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  17. Quentin Forestier Moi, j'ai râlé pour les deux. ^.^
    Tiburce Guyard C'est marrant, cet exemple de femme-chevalier, parce qu'en vrai, il y en a eu. Assez peu, bien sûr, mais suffisamment pour qu'il y ait des ordres, sans compter les combattantes occasionnelles.
    Le "réalisme" est souvent bien ignorant.

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  18. Quentin Forestier je ne pensais plus du tout à ONE%. Oui, pour ce dernier, c'est d'une part l'emballage/marketing des règles (au sens strict, ce n'est pas péjoratif en soi) et surtout - surtout - la réaction de l'éditeur Game "-10% pour les blondes à forte poitrine" Fu ; sa manière de réagir quand quelques souscripteurs ont remarqué de biais et ont demandé de manière tout à fait cordiale s'il était possible de changer cela. Le sophisme du réalisme a été utilisé, effectivement, mais c'était une goutte, heu, d'eau dans la shitstorm.

    Plenilunio est passé tout à fait sous mon radar, tu me le fais découvrir. C'est un tout autre problème, celui de la sexualisation sexiste, du male gaze. Pas question de réalisme ici. Je n'ai pas d'info pour aller plus loin.

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  19. Zut, à me justifier de ne pas être le chevalier blanc du sexisme rôliste ou de ne pas offrir le spectacle de guignol en action au moindre prétexte, j'en oublie l'important ;)

    Le problème reste le joueurs et les contrats sociaux.

    Oui. Les joueuses font ce qu'elles veulent des jdr. (Déjà quand ce sont des jeux vidéos qui ne peuvent pas vraiment dériver demandent nettement plus d'effort pour être modifiés...) Et cela fait partie de la société dans son ensemble.

    MAIS

    Les jeux peuvent ne pas présenter ce biais. Après les joueuses en font ce qu'elles veulent, mais le jeu ne les fera pas commencer là.

    Les jeux peuvent présenter, explicitement ou implicitement, un exemple meilleur.

    Cela fait partie d'un changement global, cela ne suffira pas, mais j'aimerais tant voir ma passion être en avance sur le reste de la société de ce point de vue qui m'importe beaucoup.

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  20. Oh t'as même écrit mon nom avec un coeur, c'est trop chou <3

    Merci :)

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  21. Tu viens d'exprimer un truc que j'ai écrit et effacé au moins quatre cents fois cette année sans que ça puisse ressembler à quelque chose.

    C'est EXACTEMENT ca.

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  22. Il ne reste plus qu'à condenser ça, et à l'imprimer sur des t-shirts pour révolutionner notre loisir ;)

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  23. Oui mais pas trop long alors, parce que ya que les narrativistes qui prennent le temps de lire.

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