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10 novembre 2016

Le mythe du jeu complet Vous ne m’avez pas rappelé que je voulais vous en parler, bande de canaillous, mais vous n’y...

Le mythe du jeu complet Vous ne m’avez pas rappelé que je voulais vous en parler, bande de canaillous, mais vous n’y couperez pas pour autant. De nouveau, si je vous en parle, c’est parce que j’ai un moment ciré à ses cedènes, heu, cédé à ses sirènes.

Je ne sais pas s’il est né dans le sillage de la Forge ou pas, s’il en est héritier, déviance ou pas, mais ce mythe protéiforme est un peu toxique. C’est Jerome Larre qui m’en a fait prendre conscience il y a quelques temps en me signalant que je disais grosso merdo de la merde à propos de Cyberpunk 2020, quand je disais un truc du genre « oui, mais c’est pas un jeu complet, tu n’as pas du tout ce qu’il faut pour y jouer ». C’était effectivement une belle connerie. (Bon, on en a pas rediscuter après, donc tout ceci c'est du Sildoenfein sans caution extérieure de qui que ce soit hein.)

Le mythe du jeu complet c’est de croire qu’un jdr peut et doit être complet, sous peine de ne pas être bon, voire de ne pas être un vrai jeu. Bullshit. Complete and utter bullshit.

Un jdr ne peut pas être absolument complet. Croire qu’il peut contenir tout ce qui est nécessaire pour y jouer exactement est une vue de l’esprit. Parce qu’un jdr se base sur nos interactions sociales pré-existantes, sur nos talents et compétences, sur nos conventions, sur nos personnalités, connaissances, notre culture… et qu’il est impossible de les faire rentrer toutes dans la boite. Je ne parles pas du fait que les jeux sont livrés sans leurs joueurs (encore heureux, pour ça il y a la télévision), mais du fait qu’il est impossible de prendre tout ce qui est nécessaire pour jouer exactement comme l’auteur l’a prévu en l’identifiant, le transformant et le mettant dans le jeu, quelle que soit la forme que cela prenne. Rien que la manière dont nous menons « naturellement » une conversation, ou un évènement social tel un jeu, sont des apprentissages culturels et feront dévier la mise en application du jeu.

Ensuite, il y a notion de « le jeu contient-il tout ce qui est nécessaire pour (bien) y jouer ? » explique-t-il comment (par exemple) écrire un scénario pour le jeu ? Comment bien jouer son personnage ? Comment établir le contrat social ? Comment avoir de bonnes idées ? Quels concepts de personnage fonctionnent et lesquels ne fonctionnent pas ? Quelles réactions sont un terrain fertile pour le jeu et quelles réactions sont toxique ? Comment bien optimiser son usage des règles ? (par exemple comment faire une analyse de probabilité ?)… C’est sans fin.

Un jdr « complet » serait un volume énorme, impossible à aborder, à dominer. (Quant à l’écrire…) Il faut inévitablement se baser sur des présupposés, des prérequis et il y aura inévitablement des gens qui seront laissés sur le bord de la route.

Et puis, tenir compte des capacités de son public, c’est alléger sa communication et les respecter. Évidemment, cela risque de tomber à plat pour des personnes en dehors de ce public.

Automatiquement cela fait du jeu une œuvre sujette à l’interprétation. Et c’est tant mieux.

Un corolaire du mythe du jeu complet est qu’il n’y aurait pas de bons ou mauvais meneurs (voire joueuses), il n’y aurait que des bons et mauvais jeux. Bhein non. Au-delà de la question de l’adéquation entre un jeu et ses participantes, il y a toute ces questions des prérequis. Et de la difficulté des jeux. Il y a une compétence des participantes, les jeux qui l’exploitent leur permettent d’aller plus loin, ou en tous cas ailleurs, que les jeux qui l’ignorent. Automatiquement ces jeux sont bons pour les joueuses qui ont les compétences adéquate – les bonnes joueuses – et mauvais pour les autres. Ce corolaire est donc incohérent.

Une extension du mythe du jeu : il faudrait prendre le jeu dans son ensemble – si ne joues pas au jeu exactement tel qu’il est écrit, je ne joue pas au jeu. D’une part : et alors ? Franchement : et alors ? De toutes façons, il est impossible pour l’auteur de transcrire exactement ses intentions, pour les joueuses d’appliquer exactement le jeu qui leur est transmis. Ensuite un jeu de rôle, c’est une bête complexe. Cela comprend potentiellement des règles, une forme, un univers, des personnages, un ou des propos, plusieurs sous-systèmes mécanisés ou non, des histoires… Et si des morceaux ne sont pas bons ? S’ils ne me conviennent pas à moi ? Si j’ai les prérequis pour certains morceaux et pas pour d’autres ? Si je dépasse largement ces prérequis et que donc je serai plus gêné par le jeu qu’aidé par lui pour atteindre la partie qui m’intéresse vraiment (le propos, l’univers, …) Car, oui, je vais en général être intéressé par le jeu pour un ou plusieurs de ces morceaux, très rarement par tout. Alors pour quelle raison devrais-je le prendre, toujours, partout, dans son ensemble ?

Vivent les jeux incomplets ! Vivent les espaces libres !
Et Cyberpunk 2020 c’est un très bon jeu. Même s’il était incomplet. Même si je ne vois pas comment un novice aurait pu l’aborder. Même si la manière dont il a été écrit a fait qu’il n’a généralement pas été compris. C’est un putain de bon jeu.

http://www.legrog.org/jeux/cyberpunk/cyberpunk-2020/cyberpunk-2020-2eme-ed-revisee-fr

48 commentaires:

  1. Est-ce que pour toi le monopoly est un jeu complet ?

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  2. Non, bien sûr. Et encore moins en tant que jdr.

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  3. alors je n'ai rien à dire de plus. Je considère le monopoly comme un jeu complet. Du coup on n'a pas du tout le même referentiel, on ne peut pas être d'accord sur ce point.

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  4. Et comme certains me le font dire en privé : il s'agit plus d'un message destructif que constructif. Mais parfois il faut démolir la mauvaise construction afin d'en bâtir une meilleure.

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  5. Tout est surtout une question de présentation. Quand on me dit qu'un jeu est 'tout ce dont j'ai besoin pour jouer' mais quand fait il faut rajouter des douzaines d'heures de préparation pour effectivement jouer, je suis légitime à râler.
    Si on me dit "c'est une boîte à outil pour créer vos parties", ok banco, ça peut être aussi incomplet que tu veux.

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  6. Sub, mais ça part mal car j'ai l'impression de partager l'avis de Luke Wayland (enfin, sauf pour le Monopoly pour lequel il n'est pas indiqué de condition de victoire la dernière fois que j'ai vérifié).

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  7. "Et Cyberpunk 2020 [...] est un putain de bon jeu"

    Hell yeah!

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  8. Si tu veux jouer à cela Luke Wayland, voici certaines choses qui manquent manifestement des règles du Monopoly, toutes basées sur des expériences réelles :
    - Comment calculer 10% de sa valeur en amende ? Tout le monde n’est pas d’accord sur la manière de calculer 10% (en particulier comment arrondit-on ?)
    - Que faire quand un joueur refuse de prendre une décision quand son pion atterri sur une propriété qui est encore sans propriétaire et refuse de quitter le jeu ?
    - D’ailleurs que faire quand un joueur désire quitter le jeu ?
    - Que se passe-t-il quand, au troisième double d’un joueur, son pion atterrit naturellement sur la case « prison » : il visite ou il est en prison ?
    - Que se passe-t-il si les dés sont lancés pendant que le propriétaire essaye de réclamer son loyer ?
    - Peut-on négocier pour ne pas se voir demander le loyer ? Dans quelle mesure peut-on recourir à des menaces ?
    - Peut-on négocier pour que le joueur suivant lance vite les dés et évite ainsi la collecte du loyer ?
    - Comment se passent les enchères ?

    Il est complet, ce jeu ?

    Mais je parlais de jdr. Évidemment tu peux changer la définition de complet en « à partir du moment où certaines joueuses peuvent en tirer quelque chose », mais alors tu es juste d’accord avec moi, sauf sur le vocabulaire.

    Et si on veut parler de l'intention de la créatrice, du propos du jeu : elle aurait vraiment dû se fendre d'une note d'intention (ou l'éditeur la publier) parce que je n'ai jamais rencontré personne qui a compris le propos du jeu. Ou même qu'il pouvait y en avoir un.

    +Pierre M je crois (suppose) que la condition de victoire, cela dépend de l'édition (es dernières en ont une : le dernier joueur non éliminé gagne le jeu). Ce qui est encore un autre sac de nœud si on veut croire au mythe.

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  9. De mon point de vue, avec un angle un peu différent :
    + tous les joueurs n'ont pas les mêmes compétences ou les mêmes savoirs. Que ce soit entre eux, ou même parce qu'au fil du temps leur propre compétence évolue
    + il n'y a quasi aucun jeu qui enseigne tous les savoirs nécessaires pour y jouer (ne serait-ce que lire pour les jeux écrits, expliquer comment on lit les résultats d'un dé, etc.). C'est moins régulier mais ça arrive aussi pour le matériel nécessaire au jeu (stylo, table, etc.).
    + chercher à enseigner tous ces savoirs peut être une sorte d'idéal de conception, pas de souci avec ça
    + chercher à proposer un jeu adapté à des joueurs de profils différents peut en être un autre.
    + Du coup, ne pas enseigner tous les savoirs pour jouer à un jeu donné peut donc très difficilement être un argument critique.
    + mais dire qu'un jeu est mal ciblé et/ou n'est pas clair sur ce qui est attendu comme compétence minimale est une critique tout à fait recevable.

    Je diverge beaucoup plus sur les histoires d'intentions par contre.

    Pour prendre quatre exemples extrêmes :
    + j'achète un jeu de rôle japonais, mais je suis incapable de lire le japonais. Est-ce que je peux reprocher à ce jeu de ne pas être complet parce que je ne peux pas le comprendre / le pratiquer ? Et si le jeu a un titre anglais et que je ne savais pas qu'il était en japonais ?
    + j'achète un jeu de rôle sur un roman ou une série, mais je ne les connais pas. Est-ce que je peux reprocher à ce jeu de ne pas être complet parce que je n'ai pas toutes les références culturelles nécessaires pour comprendre ?
    + je suis un wargamer du midwest dans les années 70, j'ai un jeu orienté fantasy, ciblé pour mes potes et moi, écrit par un autre wargamer. Il me demande d'utiliser des figurines et deux autres jeux dans des conditions très spécifiques, mais mes potes et moi avons déjà tous ça. De plus, il ne perd pas du temps à m'expliquer des trucs que tous les gens de mon groupe connaissent déjà. Est-ce que le jeu est complet ? Et si mon cousin qui ne pratique pas les wargames mais ne jure que par Tolkien essaye, est-ce qu'il peut reprocher au jeu de ne pas être complet ? Et si je lui prête mes figs et les deux autres jeux, mais qu'il ne comprend quand même pas nos "trucs" de wargamers?
    + si je vais en vacances avec une boîte de jeu et que je ne peux pas y jouer juste avec le contenu de la boîte, est-ce que je peux reprocher au jeu de ne pas être complet ? Dans le cas où il me manque 1) un crayon ou une table 2) un dé 3) des figurines 4) un supplément 5) des amis ?

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  10. Gherhartd Sildoenfein je n'ai pas le temps de débattre avec toi sur les règles du monopoly. Je persiste à considérer le monopoly comme un jeu complet, tout comme Apocalypse World, Dogs in the Wineyard, Perdu sous la pluie ou Prosopopée, entre autres, si on parle de jdr.
    Ce que je te dis c'est que tu essaies de tracer une ligne précise sur un concept subjectif. D’où ma question sur ton point de vue sur cette subjectivité pour comprendre quelle était ton échelle. Elle est différente de la mienne, ça clos la discussion. Tout n'a pas une définition universelle, je dirais même que rien n'en a vraiment une et que tout est une question de point de vue (wink Hasgard aka Big Brother) mais la c'est un autre débat.

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  11. /sub
    Et pour apporter un truc intéressant, comme tu parles au début de The Forge, je pense que The Forge a surtout amené l'idée justement de recentrer le propos du jeu, de ne pas chercher à tout gérer, mais au contraire de se concentrer sur des jeux plus resserrés dans leur concept, ce qui les rend plus simples à expliquer.

    Après il ne faut peut-être pas non plus être complètement psychorigide, non? Les échecs sont un jeu complet (n'est-ce pas?), mais oui certes, les échecs ne prévoient pas ce qu'on doit faire si subitement un joueur venait à décéder en pleine partie ou s'il déplace par la force de son esprit les pièces (ne riez pas, Magneto joue face au Professeur Xavier, c'est un cas concret!). Il y a une part de confiance placée dans le joueur pour s'approprier et gérer les cas de figure les plus rares, sinon.

    N'est-ce pas d'ailleurs pour ça qu'on parle de rulings en contraste des rules, l'arbitre (le MJ) est présent pour gérer les cas de figure non-prévus et appliquer dans les détails les grandes lignes des règles.

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  12. alors d'abord le mythe du jeu complet est bien antérieur à la Forge. Rolemaster ou même F.A.T.A.L. ce sont des tentatives de jeux complets (avec le résultat que l'on sait pour le dernier).
    Pour moi (et je rejoins Luke Wayland) un jeu "complet" c'est un jeu qui propose tous les éléments nécessaires à mettre à son intention de jeu. Du coup cela permet d'avoir des jeux très légers qui n'ont pas d'ambitions démesurées. Perdus Sous la Pluie est un bon exemple de jeu "complet" assez succinct.

    Je vais encore me faire des copains mais Vampire est un jeu incomplet, ou au moins une tentative ratée de jeu complet. En effet le jeu propose de jouer du drame, des intrigues à tiroirs entre êtres immortels. Un jeu où les personnages sont au coeur de l'histoire. Sauf qu'on nous a rajouté un bloc d'historique qui montre que les pjs sont au mieux des témoins des manigances des Anciens et que les règles nous encouragent à jouer en mode Super héros dark avec des brouettes de dés et des options d'optimisation. Le jeu, malgré ses qualités, n'arrive pas à proposer tous les éléments nécessaires à ce qu'il prétend et va même parasiter son discours avec des éléments contradictoires. Ce qui a fait de ce jeu un bon jeu, c'est que chacun y a trouvé ce qu'il voulait dans ce Gloubiboulga.

    La notion apporté par la Forge n'est pas le jeu "complet" mais le jeu "cadré" dans le sens où un jeu forgien impose d'y jouer de façon très précise pour correspondre à la vision de son auteur. C'est une optique intéressante pour peu qu'on y adhère. Et c'est là que le bât blesse.
    Pour ma part une distanciation vis à vis de cette notion en parlant de "proposition de jeu" permet d'éviter des inévitables frustrations. D'autant plus fortes que les rolistes étaient habitués à des propositions "molles" qui n'imposaient absolument rien.

    Pour revenir à la notion de complet, je te l'accorde c'est un peu casse-gueule Je préfère parler de jeu "cohérent".

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  13. Tu critiques Cyberpunk ..Oh purée.. toi Gherhartd Sildoenfein​ je vais t'éventrer avec mes griffes rectractiles!!!^^

    1) Je pars du principe qu'il faut éviter de critiquer de manière acerbe nos vieux jeux avec l'étendu de nos réflexions/évolutions actuelles. Évidemment que des défauts ils en ont plein. C juste ke ce n est pas très «fairplay» de le faire aujourd'hui... Faut le faire plutôt avec les nouveaux jeux qui sortent. (Cela dit, si tu le fais pour faire du buzz pour un site ou donner des conseils aux futurs créateurs.. whynot?)

    2) Et en ce sens, je trouve ta réflexion intéressante. Et pour ma part je pense qu'on a raison de s'interroger (se torturer?) et de se remettre en question (sauf si on reste au stade «bashing gratuit» et qu'on ne passe jamais à la pratique/création). Après tout, la création est un «acte masochiste» (accouchement?) par essence^^

    3) Je vais même dire mieux: ta liste de questions m'intéresse (tu permets que je te la pique?). Le jeu parfait n existe pas... cette liste/questionnement est sans fin? Et alors? Ou est le drame?

    Je ne sais pas pour vous, mais moi j'achète et lis tellement de bouquins qu'on foiré/zappé ces questionnements, que perso j'apprécierai que davantage de créateurs se les posent un petit peu plus justement... pas vous?

    Ceci n'est que mon avis bien entendu (qui n'est pas humble, puisque moi-même je ne le suis pas, il vous en prie^^) 🙏

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  14. Et malgré tout ça, je continue à penser que quand des gens motivés et enthousiastes jouent à ton jeu et qu'il s'arrêtent régulièrement en se demandant "et on fait quoi maintenant", c'est un problème de conception.

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  15. J'enfonce le clou aussi sur l'argumentaire de Gherhartd Sildoenfein qui peut être assez vite biaisé.
    Le jeu complet n'existe pas? Il n'y a pas de mauvais ou de bons jeux? Ouais ben à mon avis c'est la porte ouverte aux jeux merdiques.
    Combien de fois ais je lu / entendu devant des arguments sur des problèmes de cohérence, de conception, d'écriture un auteur répondre un "ouais c'est juste que c'est pas pour toi".
    Dans ces ca là j'ai bien envie de sortir le Colt .45

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  16. Si tous les jeux sont incomplets (et je dirais la même chose si on m'affirmait que tous les jeux l'étaient), pourquoi en parler ?
    Je préfère qu'on discute pour se demander quelles sont les critères de complétude (resp. incomplétude), se demander à partir de quand cette incomplétude est un problème ou une fonctionnalité d'un jeu, plutôt que d'asséner un état de fait qui ne permet pas de débattre.
    MAIS... je soupçonne que Gherhartd Sildoenfein n'est pas complètement convaincu de ce qu'il affirme, et qu'il veut qu'on en discute.
    Donc.
    Quand un jeu me donne suffisamment de clé pour que je sache dans quel univers je joue, ce que j'y joue, comment je vais le jouer (et je ne parle pas de l'aspect technique), il me semble qu'il est complet. Je ne peux pas parler de Cyberpunk, mais si je prends Shadowrun (dans les incarnations que je connais) j'ai l'impression que le jeu ne m'a pas dit comment je le jouais. Je suis un petit street sam qui vivote entre deux runs, mais comment je joue ce vivotage ? Je ne sais pas...
    Si je prends Sombre (que j'ai mené) ou Dungeon World (des deux côtés de l'écran, j'ai la réponse à toutes ces questions - on pourra suspecter le deuxième d'être assis sur les épaules de ses augustes prédécesseurs (est-il complet, ou est-ce que je comble les trous par ma connaissance d'un meta jeu medfan ?), mais pas le premier.

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  17. Pierre M : je ne peux pas parler pour Gherhartd Sildoenfein et ne le fais donc que pour moi, mais au départ, ces réflexions viennent d'un rejet de l'argument du jeu complet ou incomplet comme argument critique.
    Dans les années 2000, nombre de tenants des jeux classiques dénigrent les jeux "nouveaux" parce que non complets. Dans le sens inverse, la proportion est sans doute encore plus forte.
    Typiquement, même un jeu relativement tardif, comme Fiasco , est largement considéré comme incomplet parce qu'il ne contient pas de système de résolution (ce qui est une double connerie amha).
    Dans le sens inverse, tel ou tel jeu n'est pas complet parce qu'il n'explique pas ce qu'est un JdR alors qu'il est vendu qu'à des rôlistes dans des magasins de JdR avec la mention JdR dessus.
    Dans les deux cas, on a des critiques de type : "ce jeu n'est pas bon car il n'est pas complet comme les nôtres". Et dans les deux cas la complétude affirmée est une imposture. Au moins tant qu'elle n'est pas mieux définie.
    Après, pour les histoires d'intention, je pense que c'est une voie de garage. Les auteurs respectifs se sont exprimés que les joueurs ne jouaient majoritairement pas à Bitume ou à Cyberpunk de façon conforme à leur intention, cela ne veut pas dire que leurs jeux sont plus ou moins complets.

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  18. La vraie question est : Que ferait-on d'un jeu complet ?
    On parle bien d'imagination ici non ?

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  19. NaS BrainDeaD
    On parle ici d'un système de jeu complet (ou pas ;) ) permettant d'y jouer. Si je te donne le s règles du jeu de Monopoly sans le plateau de jeu, tu auras plus de mal à y jouer.
    Si on te donne les règles d' Apocalypse World sans te fournir les livrets, tu pourras y jouer en complétant avec ton imagination, mais en fait tu ne seras pas en train de jouer à Apocalypse World (ce qui n'implique pas que tu ne feras pas une bonne partie ni aucun jugement de valeur de ma part).

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  20. Jerome Larre
    J'entends bien, mais il y avait visiblement un sous texte dans le discours de Gherhartd Sildoenfein que je n'avais pas. Disons que la complétude de son propos était sujet à débat :)
    Je pense que la complétude est une notion intéressante pour penser la jeuderôlogie, et que la balayer en disant que tout jeu est incomplet ne permet pas de réfléchir, justement.

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  21. Jerome Larre Sur l'intention je pense justement que c'est important. Les exemples que tu donnes prouvent bien qu'il faut être clair là dessus, sinon à quoi bon? Après il faut partir avec l'idée que l'intention et le jeu en général ne sont que des propositions. Pas la peine de faire un disclaimer en expliquant que c'est vital de joueur le jeu by the book. On ne peut rien contre le libre arbitre des joueurs.
    Mais ça n'empêche de créer toutes les conditions pour.

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  22. Je ne suis pas sur de comprendre NaS BrainDeaD​ ...fais-tu un parallèle entre «recherche de cohérence» et «imagination» ? En quoi l'un briderait l'autre?

    Et puis ça veut dire quoi un jeu «complet» pour toi?

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  23. Alban, je ne comprends pas en quoi les exemples que je donne te font penser ça. Pour moi, c'est un biais d'auteur, pas de joueur, et que d'une partie des critiques.

    Je te fais une analogie à la con et bien caricaturale : tu veux faire une tarte aux fraises et tu la fais aux framboises (mais tu peux dire un jeu cyberpunk et un jeu de barbies bad ass si tu préfères :p). Si je regarde avec le point de vue du cuistot, je peux trouver que t'es un âne, compatir ou chercher à t'aider à ne pas te planter la prochaine fois, voire te filer une meilleure recette de tarte aux framboises. Si je suis la personne pour laquelle tu fais la tarte, je m'en fous, je veux juste savoir si elle est bonne et si y a du rab.

    (bon bin sûr, si j'ai commandé spécifiquement une tarte aux fraises et que je ne veux pas être surpris, ou que tu viens de m'expliquer pendant trois heures à quel point tu faisais de bonnes tartes aux fraises, ça risque de pas me pousser vers la tolérance hein :D)

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  24. A priori un jeu "complet" n'a aucun sens. Complet de quoi ? De qui ? Et surtout "pourquoi" ?
    Déjà avec des livres bibles tout le monde voit midi à sa porte, je ne vois pas bien comment on pourrait y parvenir.
    Et à quoi bon ? L'idée est de nous laisser voguer dans l'imaginaire d'un monde qu'on s'invente à tout moment... Avoir un livre complet limiterait (à mon sens) cette imagination.

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  25. Oui enfin avec l'argument "l'imagination suffit" pourquoi s'emmerder à écrire/acheter/lire des bouquins.
    Sinon pour revenir sur l'analogie de Jerome Larre en l'occurence il me semble que la promesse c'était surtout "je vais vous faire une tarte aux fruits". C'est sûr que si le cuistot voulait faire une tarte aux fraises et qu'il n'avait que des framboises il va être frustré.
    Après l'intention ça peut être aussi de ne pas en avoir. Dans ce cas on a un jeu "cohérent" mais volontairement "incomplet".

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  26. NaS BrainDeaD
    je pense que tu mets derrière cette notion de "jeu complet" bien plus que ce que nous y mettons, j'ai du mal à voir où tu veux en venir...
    Quand Sombre me propose de faire jouer des victimes de films d'horreur, il décrit par le menu l'ensemble des techniques par lesquelles le jeu compte atteindre son objectif, et je peux prendre le jeu, sans a priori, et je peux jouer ce qu'il me propose de jouer. Le jeu est complet dans le sens où il se suffit à lui-même.

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  27. Sur Sombre on a un cas particulier car si on se rappelle la polémique avec La Cellule le jeu apparait effectivement "incomplet" si ce n'est que les scénarios comblent ce manque. Au final le livre boucle la boucle mais pas dans son système de résolution.

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  28. Bref, un JdR tout à fait typique en fait.

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  29. Je vous ai lu un peu vite et il me semble que vous dialoguez entre sourds parce que les uns parlent de Jdr en sous-entendant "livre de...", d'autres "partie de..." et d'autres encore d'expérience ludique.
    Si on pouvait déjà s'entendre pour dire que le livre de jdr est incomplet par essence et que c'est la partie qui comble le trou (grâce à l'imaginaire commun) pour que l'expérience ludique soit complète; il me semble qu'on avancerait.
    Bref, on ne peut validement parler que de livre de jdr incomplet. AMHA

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  30. Je suis d'accord sur l'incomplétude par essence d'un jdr (et d'un jeu en général). Simplement j'utilisais "complet" pour expliciter "contient l'ensemble des éléments suffisant pour reproduire les intentions de jeu de l'auteur".

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  31. Sophisme ! Littéralisme !

    Il y a deux choses à distinguer :

    - L'usage du terme "incomplet" dans la narratologie, qui aime à dire que l'interprétation et l'imagination viennent se loger dans les interstices. Ok. C'est la base des travaux sur la place du lecteur dans le récit depuis Iser et popularisée par Umberto Eco. C'est applicable au jdr. Très bien.

    - L'usage courant du terme "jeu incomplet", qui signifie que le jeu ne donne pas les ressources nécessaires et suffisantes pour mettre en oeuvre une partie. Et franchement, faire une partie rien qu'avec le livre de base de Cyberpunk 2020, c'est pas facile du tout.

    Ces deux usages du mot ne sont pas plus ou moins légitimes l'un que l'autre, mais ils sont chacun vrais dans un référentiel différent : choisir l'un ou l'autre dépend du cadre de l'énonciation.

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  32. C'est intéressant Benjamin K. quand tu dis "la place du lecteur dans le récit" ...fais-tu référence au lecteur qui se projette d'emblée sur la psychologie du personnage principal. Et qui, confronté à une foule de ressentis, devient acteur du récit? Ce genre de référence?...

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  33. Pour en revenir à cyberpunk, le livre de base est tout à fait suffisant pour jouer.
    Les meilleurs suppléments ne sont que des développements de ce qui est déjà dans le livre de base.

    Si : un jeu complet pour vous veut dire le bouquin de base suffit pour jouer. Alors j'ai effectivement répondu à cote de la plaque.

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  34. Pernic Nori Il ne s'agit pas tant de l'identification au personnage principal que la capacité du lecteur à donner un sens au récit et à en combler les blancs, à imaginer ce qui se passer entre deux scènes et hors champ (je t'invite à lire Lector in Fabula si ça t'intéresse).

    NaS BrainDeaD Je ne reviendrai pas sur le cas particulier de Cyberpunk, on pourrait prendre l'exemple de n'importe quel autre jeu. Parce que la complétude, dans le sens courant du terme, est une affaire de besoins, qui diffèrent suivant les joueurs. ;-)

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  35. C'est génial tout ce que voir avez écrit, petits entre le boulot et le jeu ce soir je n'ai pas le temps de vous répondre tout de suite et pourtant il y en a des choses à dire ! Je reviens demain, là je suis rejoindre le 588e bataillon de bombardiers nocturnes.

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  36. Le lecteur qui en sait plus que le perso, je vois, merci pour la référence Benjamin K.

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  37. Pernic Nori : un truc simple pour illustrer ce dont parle Benjamin, c'est de te souvenir de la fin de Blade Runner. Est-ce que Deckard est un replicant, pour toi, ou pas ? Le film ne choisit pas de façon explicite. Dans le cas où cela en est un, tu as une version de l'histoire (une histoire en fait), si ce n'en est pas un, cela en est une autre. Mais c'est toi qui va créer l'une ou l'autre des histoires en rajoutant / par ton interprétation. Tu n'as pas besoin de te prendre pour Deckard pour ça.
    Cet exemple-là est assez simple à visualiser parce qu'il s'agit d'un élément important et volontairement pas expliqué, mais tu retrouves les mêmes mécanismes dans la plupart des fictions. C'est effectivement un point super important et Eco explique tout ça très bien (même s'il faut parfois s'accrocher).
    C'est un phénomène très important en JdR : on participe aussi par la réception, pas que par l'expression (mais l'expression est tellement plus évidente qu'on en oublie souvent la réception).

    Benjamin K. : si ce n'est pas ce dont tu voulais parler, n'hésite pas à me corriger :)

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  38. Jerome Larre Si, c'est exactement ça, et l'exemple est très bon puisqu'il illustre le rôle du lecteur avec une culture commune aux rôlistes.
    Dans mon souvenir, l'exemple-clé d'Umberto Eco (mais c'est peut-être dans L'Oeuvre ouverte et pas dans Lector in Fabula), c'est les Lettres persanes, où il peut se passer énormément de choses entre deux lettres, notamment dans le harem. Et tout n'est pas dit, bien loin de là, puisque les différents narrateurs ne sont pas fiables et se cachent mutuellement des choses. Le lecteur reconstitue son propre récit dans ces silences du texte, et c'est ce qui rend la lecture du roman si intéressante.

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  39. Moi ce que je sais c'est qu'Esteren est un jeu incomplet mais un bon jeu pour moi.

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  40. Moi ce que je sais c'est que je semble être frappé d'une malédiction "ne peut pas s'approcher de manière significative d'un clavier" depuis que 'jai posté ceci. Le monde conspire contre moi.

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  41. «Tell me, Mr Anderson, what good is a phone call if you're unable to speak?» 👿

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  42. Je reviens à mon propos original : il était bien destructeur et non constructif. Un contre-troll. Il visait la critique abstraite et bien mal avisée « oui mais ce n’est pas un jeu complet », critique qui est finalement à mon avis nécessairement soit utilisée de mauvaise foi, soit sans y avoir vraiment réfléchi, soit en répétant ce que l’on a entendu une personne que l’on considère compétente proférer (idem). Mais qui condamne en général sans appel le jeu considéré.

    Sur la définition de « complet » Luke Wayland, tu étais d’humeur particulièrement trollesque, il me semble. Évidemment, il y a des définitions concurrentes et je n’ai aucune autorité pour en imposer une dans l’absolu. Mais dans ce fil de discussion, j’ai choisi celle dont je voulais parler, et ton relativisme d’arrière-garde n’apporte rien au débat.

    Et je ne voulais pas, à l’origine, aller plus loin. Juste avoir un post vers lequel diriger les personnes qui profèrent ce faux argument pour y répondre, rien de plus. Mais c’était bien mal vous connaitre :D

    Complet et incomplet, un ami qui préfère garder l’anonymat m’écrivait en MP ce qui suit et qui, je trouve, enfonce bien le clou :

    JDR : Nous jouons les rôles de deux lapins égarés dans une plaine et cherchant à rejoindre notre terrier. Nous allons avoir une conversation pour raconter notre périple pour y arriver et la façon dont les lapins arriveront, ou non, à rejoindre leur foyer. FIN. C'est un jeu de rôle complet (mais aussi "incomplet" selon le point de vue qu'on prend) mais justement je trouve qu'il est plus simple de dire qu'un jeu n'est jamais "incomplet" que de dire qu'il n'est jamais "complet". Même si c'est un peu le verre à moitié plein ou à moitié vide.

    Bien entendu, on peut dire d’un jeu : « il m’a manqué ceci pour jouer », « j’aurai aimé y trouver cela », ce sont des avis bien plus pertinents et intéressants.

    Pour aborder la question de la complétude de manière constructive, je crois qu’il faut effectivement parler plus concrètement. « Je voudrais que mon jeu permette à X de faire Y », bref, connaitre son ou ses objectifs et son ou ses publics. Et pour ce dernier, connaitre signifie bien plus que déterminer : il faut véritablement savoir ce dont il(s) a (ont) besoin. (Dans un processus itératif ou objectifs, publics, envies et capacités des créatrices et créateurs s’ajustent mutuellement, bien entendu.) (Ou on peut ne pas se casser la tête et « laisser le jeu trouver son public », ce n’est peut-être pas la meilleure recette.) Ce qui amène la critique pertinente : « le jeu vise ce public, par conséquent il lui manque ceci ».

    Et vous citez aussi les jeux « trop complets », qui posent le problème de l’ergonomie et aussi de manquer son public en le sous-estimant. Et « incohérents » ce qui est encore une autre paire de manches (Vampire, eh? Know whatahmean, know whatahmean, nudge nudge, know whatahmean, say no more?).

    Claimer : j’aime d’amour sincère Vampire et Cyberpunk. Ne me faites pas dire ce que je ne dis pas.

    (T’as entendu, Pernic Nori ? Et oui, pique ma liste sans vergogne.)

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  43. Après cela il reste un paquet de thématiques qui m’intéressent vachement plus et que je ne suis pas prêt de laisser tomber (mais je ne vais pas poursuivre ici, il vaut mieux partir d’un point de départ plus propre) : la nécessité de l’espace de liberté, que jouer, mener et créer un/du jeu cela procède de la même chose, que les différences sont essentiellement dans les difficulté d’interaction et de communication, la cascade auctoriale et la place que l’on laisse pour les suivants, l’importance des espaces de liberté et de contraintes, l’aspect toujours composite des jdr où l’on exige souvent (d’une certaine manière à tort à mon avis) d’avoir toutes les couches et qui fait que différentes personnes se saisissent du jeu à différents niveaux et que c’est très bien (et que ce serait encore mieux si c’était plus pris en compte)…

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  44. Cette réponse n'est pas complète! :p

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  45. Vas t'on enfin parler des Big Jim, non parce que c'est important!

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  46. Oui j'ai entendu Gherhartd Sildoenfein​ ...mais arrête tes conneries quand même et réintègre la Matrice!^^ 😜

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