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7 novembre 2016

Parler de jeux différents.

Parler de jeux différents. Dans le fil où vous et moi avons abordé le cloisonnement des sous-communauté rôlistique (https://goo.gl/Jl6nhA) est apparue la notion d’une certaine barrière de communication, dans la manière d’aborder et de parler des jeux, qui pourrait être en partie responsable de certaines ruptures.

Comment parlons-nous de ces jeux qui nous plaisent ? Sommes-nous en accord avec nos interlocuteurs ? Parlons-nous la même langue ? Favorisons-nous l’échange et l’ouverture ? Parlons-nous de ce qui les intéresse ? Trop souvent, ce sont 3 « non », et j’en ai été assez coupable pour pouvoir le dire. J’ai fait un gros paquet d’erreurs.

Comment ai-je (mal) parlé de ces jeux ?

- « jeu indépendant » ou « indie » ? Pas bon. Tout d’abord, il y a là une part de revendication, d’engagement politique qui peut susciter la méfiance. Mais surtout, c’est la plupart du temps totalement inintéressant pour parler du jeu. Est-ce que vous avez déjà entendu en club présenter DD5 en disant qu’il était détenu par une société anonyme avec appel public à l'épargne ? non ? moi non plus. Et non seulement c’est inintéressant, mais en plus cela demande souvent de perdre du temps pour expliquer la notion qui n’a rien d’évident. Quand je fais cela, je perds le temps de tout le monde et détruis ma crédibilité.

- « révolutionnaire » « totalement différent » ‘novateur » ? Tout d’abord il va falloir assurer après cela. Cela active l’incrédulité, le scepticisme. Oh, bien sûr, si une partie suit effectivement et si cela prend correctement, cela pourra passer. Mais avec beaucoup de gens, cela diminue la chance de jouer : cela active l’incrédulité et le scepticisme. Des jdr « révolutionnaires », ils ont en vu des paquets et ils connaissent les limites. Ce n’est pas ce petit jeu de six pages et demi en noir et blanc tous pourris sans illustrations qui va tenir la route face aux 300 pages d’un jeu bien rôdé sur papier glacé tout en couleur avec couverture cartonnée. Ce n’est juste pas crédible, contraire à toutes leurs expériences.

-« ce qui est mieux par rapport aux jeux traditionnels » double faute : mon jeu est mieux, donc le sien est moins bien, et en plus je le mets dans une case un peu ringarde. Ding ! merci d’avoir joué avec nous, à la semaine prochaine. Ce n’était pas l’idéal pour créer de l’ouverture et de la curiosité.

- « au lieu d’avoir une résolution de tâche, c’est une résolution de conflit » « le système de jeu, je parle du système de jeu, pas de résolution, encore moins de simulation » mais de quoi je parle ? Ce n’est pas parce que cela m’intéresse moi que cela les intéresse eux. En plus je vais devoir passer un temps considérable à expliquer, me faire passer pour un intello moralisateur (c’est pas entièrement faux, notez, mais bon), ça va rester dans l’abstrait, dans le « c’est une belle théorie, mais… » Au mieux une perte de temps, certains vont fuir pour ne plus recevoir un exposé théorique dont ils n’ont rien à faire. En plus quand je fais mon érudit, je risque que certains se sentent inadéquat, insuffisants comme rôlistes. Conséquence : la fermeture, la fuite.

- « narration partagée », « narrativisme » brreeeeeep mots tabous, je risque au mieux une incompréhension, plus probablement un braquage immédiat.

-« c’est un jeu de Soren MacFarlu » oui, non, je fais juste mon prétentieux là, je n’ai jamais entendu personne tenter de faire venir des joueurs à sa table de « Pathfinder, de Jason Bulmahn ». Ça se fait par ici, pas par là.

- Les 3+1 questions de Sorensen, Crane et Wick sont censées être une super façon de présenter un jeu : de quoi parle le jeu (non pas en termes de décor, personnages et intrigue, mais en terme de thème) ? comment le fait-il ? comment l’encourage ou le récompense-t-il ? et comment le rend-il cela amusant ? C’est super intéressant pour les amateurs de conception ou de jeuderologie, mais dans la vraie vie tout le monde s’en fout. Pas parce que ce n’est pas important, mais parce que l’on y prête pas attention. (Et il y a des raisons.) Ce n’est juste pas comme cela que l’on présente un jeu. On parle du décor, éventuellement du type de personnage, très éventuellement du type de parties (parce que les jeux tradi font tout, même la baguette), de comment on lance les dés / fait un test et parfois de ce qu’il y a sur la fiche de personnages. On agrémente avec quelques anecdotes totalement inintéressantes. Bref on ne parle pas du tout le même langage. Si vous voulez vendre votre jeu, il faut s’approcher un peu plus de cela.

- Les thèmes : on va jouer amnésiques qui font une thérapie avec une drogue spéciale (il y a de la magie ? des conspirations ? c’est un jeu à secrets ?)… on va jouer des cow-boy-prêtres adolescents justiciers (et tu ris de mon nain ninja ?) qui se promènent dans les villages du Far-West pour rétablir l’ordre ébranlé par l’hérésie (heu, ouais…)… on va jouer des archéologues qui explorent les ruines d’une civilisation oubliée (il y a de l’action ? des monstres ? des poursuites ?) Hem.

Bon mais alors comment fais-je ?

Ce qui pour moi fonctionne le mieux c’est d’être ultra simple :

- Expliquer le jeu de manière simple, directe, modeste, en passant sous silence plein de trucs qui n’amusent ou n’intéressent que moi (l’auteur, le modèle économique, la filiation du jeu, les théories, …) : juste sur le modèle univers / personnages / but. Les mécaniques uniquement sur demande.

- Assurer que le jeu est simple, que les règles sont courtes et rapidement maitrisées. C’est généralement le cas.

- Proposer une partie juste pour voir, parce que « c’est un petit jeu que j’aime vraiment bien », phrase qui jusqu’à présent fait des miracles. Même pour les thèmes bizarres comme les mormons cancéreux de l’apocalypse

- SI j’ai déjà une tablée régulière pour un autre jeu, proposer un jeu différent pour la fois suivante, pour faire une pause.

- Ne pas oublier que tous les jeux ne demandent pas les mêmes qualités/capacités.

Il y a évidemment plein de jeux qui sont difficile à faire rentrer dans ce canevas : FATE (c’est pas un jeu, c’est un GURPS), Apocalypse World (mais posez juste les livrets sur la table devant les joueurs, ça fonctionne), …

Vous en pensez quoi ? Et pour vous, qu’est-ce qui a fonctionné et qu’est ce qui a foiré ?

28 commentaires:

  1. En fait en présentant le jeu comme tu le ferais pour un jeu "tradi".... bein ça marche.
    C'est aussi évident que ça.

    Et oui, montrer qu'on aime bien ce jeu et qu'on a envie d'y jouer, oui.

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  2. Parlons de Dungeon World. Genre, au hasard, hein! ;)

    C'est un jeu d'heroic-fantasy où tu joues des aventuriers un peu archétypaux. qui vont dans des donjons pour éviter que des dangers incommensurables ne viennent pourrir la surface. Attends, je te montre des livrets, tu vas tout de suite comprendre.
    Et là, je sors un des beaux livrets de Sanctuaire.

    J'ai bon?

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  3. Pour l'avoir fait ce week end avec un jeu indé qui aurait pu dérouter les joueurs mais en fait pas du tout je suis en partie d'accord mais pas tout à fait.
    Mon approche est une variante de celle de Wick-Sorensen et ce décline ainsi.

    - Qu'est ce qu'on joue? Quels sont les persos, les univers, le concept général.
    - Comment ça fonctionne? Je décrit très largement les intentions du jeu en terme de mécaniques et ce qu'elles sous-entendent.
    - Pourquoi c'est cool? Qu'est ce qui marche bien à la fois mécaniquement et conceptuellement pour que ce soit intéressant.

    On peut parler de narration partagée, de système forgien ou autre mais sans rentrer dans les détails. Par exemple au lieu de dire "c'est un jeu ludiste d'après la GNS incluant de la narration partagée" j'ai dit "c'est un jeu tactico-narratif, tu lances les dés et choisi les bonnes options et tu auras plus de pouvoir sur la narration".

    Et ça marche bien. On rentre pas dans des histoires de chapelle, de conception de ce qu'est un jdr ou pas. Le jeu est cool (ou pas!). Point.

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  4. Des chocolats pour tout le monde ;) (vous m'en laisserez un peu ?)

    En relisant, je vois deux possibilités qui sont tout de même différentes : quand on vient vers moi pour parler d'un jeu ou quand je vais vers les autres pour leur en parler.

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  5. J'étais en train de me dire que ton génôme shaddock allait refaire surface tôt ou tard... ;)

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  6. /Mode coup de gueule ON
    Il faudrait arrêter de parler de jeu "tradi" à moins que vous connaissiez des JdR pratiqués depuis tellement de siècles que c'est devenu une tradition !
    Quand je lis JdR "tradi" dans un post, j'interprête ça comme l'auteur étant un p*tain de hipster échappé de la Cellule qui crache sur les origines des JdR actuels et sur le JdR que je qualifie de "classique".
    Évidemment ça le discrédite lui et son post à mes yeux.
    /Mode coup de gueule OFF
    Non sérieusement les gars, cessez avec les appellations négatives. Je ne fais plus de JdR classiques, je suis passé à d'autres choses mais j'ai du respect pour ces jeux et pour la grande majorité des gens qui y trouvent leur bonheur.

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  7. J'ai jamais senti que "tradi" étaient péjoratifs. Juste "usuels" ou "tel qu'on y joue de façon classiques"

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  8. ça créé une séparation entre les deux qui, à mon avis, n'a jamais rien apporté de positif.
    D'autant plus que cette séparation est finalement assez floue et très dépendante de l'observateur. (Perso, ma pratique c'est du jdr tradi avec un comportement de rôliste indie, donc bonjour la caractérisation)

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  9. Gherhartd Sildoenfein dans ce cas il ne faudrait pas que tu l'utilises : (parce que les jeux tradi font tout, même la baguette),
    ;-)

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  10. Dans le registre de la parodie, je peux ^_^ j'essaye généralement de l'éviter, mais parfois c'est juste plus facile, plus rapide, plus séduisant... parfois je cède. J'essaye d'être prudent dans l'usage.

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  11. Je suis surpris que personne n'emploie le terme de mainstream pour parler des jeux "tradi" (même si tout pareil, pour moi, y a pas de connotation péjorative). Est-ce que ce terme ne heurte aucune sensibilité? Avantage: il décrit plutôt bien la domination du marché, et l'aspect "y aura pas de surprise, on sait à quoi s'attendre quand on va jouer à un tel jeu".

    Pour présenter un jeu correctement, le mieux est 1/ d'être enthousiaste (c'est un jeu qu'on aime) et 2/ de dire que les joueurs vont s'amuser.

    Pour l'avoir testé et approuvé: ne pas dire que c'est un jeu de rôle. Dire que c'est un jeu de rôle, ça crée des attentes. Ceux qui ne connaissent qu'une forme de jeu de rôle vont s'attendre mentalement à cette forme et cette forme seule. Ils vont immédiatement rejeter le jeu s'ils se rendent compte que la forme que tu proposes ne correspond pas à leur pratique. Alors que si tu dis "oh un petit jeu" (rester humble plutôt que d'annoncer le jeu révolutionnaire), un "storygame" (donc un jeu d'une autre catégorie, même si le terme ne veut rien dire), un jeu où on va juste raconter une histoire, et où on va s'amuser tous ensemble, ils n'appliquent pas leur grille de lecture et boum ils tombent dans le piège. Ils vont s'amuser. Conclure probablement que c'est pas un vrai jeu de rôle. Mais qu'ils se sont amusés.

    Et c'est ça le plus important. Parce que tu leur fais découvrir quelque chose et qu'insidieusement ça va faire son chemin dans leur esprit. C'est comme ça qu'une tablée de vieux de la vieille, de bons gros joueurs tradi, grandes gueules vouant aux gémonies les jdr "indie" que je leur proposais, a fini par tous acheter le bouquin d'AW. Et a ajouté cette corde à leur arc. Est-ce qu'ils ont arrêté de jouer aux jeux tradi? Non, bien évidemment. Les jeux "indies", ce n'est pas se convertir à une religion, au seul vrai Dieu et toutes les autres religions sont hérétiques. Mais ils ont vu qu'il existait autre chose, et que du coup il y avait des choses à piocher dans cette autre façon de jouer. Ce qui fait que maintenant, quand ils jouent à n'importe quel jdr, ils se disent : "ok, là on pourrait la jouer plus narrativiste, ça rendrait la scène plus intéressante". Ils ont enrichi leur pratique, mais ils ne sont évidemment pas devenu des narrativistes ou je ne sais quoi. On ne convertit pas les gens (sauf si ce sont des déçus des systèmes mainstream et qu'ils recherchaient désespérément autre chose), on enrichit simplement des pratiques. Et c'est comme ça qu'on crée un pont pour pouvoir ensuite discuter. Et éventuellement partir dans des discussions plus poussées.

    La dénomination, on n'en a rien à foutre, à part si on veut discourir entre théoriciens. On parle de joueurs là. De gens qui veulent juste jouer. Clairement pas des gens qui vont s'intéresser à une discussion dans lequel tu vas mentionner le system matters, le GNS, le conflict resolution, la loi de Czege, le lumpley principle, etc. A part passer pour un pédant, y a rien à y gagner.
    C'est par la pratique, en jouant, qu'on pourra ensuite parler de jeux différents. Quand les joueurs auront les points de repère pour savoir ce qu'est un jeu différent, quand ils sauront qu'il existe plusieurs façons de jouer différente. Plutôt que de sortir des grands concepts et des grands mots, jouer une scène toute simple de 10 minutes avec un système conflict resolution. On peut le faire n'importe quand, n'importe où. On n'a même pas besoin de dé pour cela (et de toute façon, on est entre rôlistes, on a forcément des dés sous la main).

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  12. Bref, quand on aura ouvert la voie du dialogue et qu'on n'aura pas soulevé des barrières mentales, faites pour se protéger les uns les autres. Quand on aura cessé de leur rabâcher que les jeux auxquels ils jouent sont de la merde et que ce qu'on propose est bien mieux. Pour pas mal d'entre nous, déçus des jeux mainstream, on confond enthousiasme et fanatisme: si ça m'a plu, si ça a changé ma façon de jouer, vous devez aussi connaître une telle épiphanie! Mais ça n'a pas à être le cas. Et il existe de toute façon plus de deux façons de jouer, il n'y a pas que le mainstream et la façon "narrativiste", donc il faudrait aussi développer les différentes façons de jouer du côté "tradi" et du côté "indie". L'OSR c'est du "tradi"? Bah sauf que c'est un retour aux sources, donc antérieur au jeu "tradi" et que c'est très différent d'une façon de faire tradi, non? Et dans les jdr "indies", c'est tout pareil? Quand je joue à Apocalypse World, c'est comme si je jouais à Microscope? Comme si je jouais à 1001 Nights? à Fall of Magic? à Fiasco? Et c'est comme si je jouais à Perdus sous la Pluie ou à Inflorenza? Je retrouve pas les mêmes choses non? L'un va me plaire plus que l'autre, correspondre plus à ce que j'aime jouer que l'autre? Je m'amuse plus avec l'un qu'avec l'autre? C'est normal?

    Y a-t-il deux camps l'un en face de l'autre qui s'opposent et se font la guerre ou une pluralité de pratiques différentes avec des joueurs qui évoluent, en adoptent certaines et en rejettent d'autres, et ne rentrent jamais parfaitement dans une seule catégorie?

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  13. Mainstream coupe aussi la production rôliste (qui n'a pas besoin de ça) en deux, et, oui, a un petit côté élitiste.

    Et chez moi, indie renvoie uniquement à un modèle économique, 'petit jeu' à un volume de pages.

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  14. Tiburce Guyard Je trouve un peu curieux de se méfier des barrières jargonneuses qui séparent radicalement des jeux qui ont pourtant des points communs et l'idée d'abandonner dès le début le terme "jeu de rôle" pour désigner certains types de jeux.

    De même je trouve un peu dommage d'abandonner complètement des aspects qui nous tiennent à cœur : disons l'aspect "politique des auteurs" qui nous amène à citer les auteurs, les fonctionnements vraiment atypiques de la narration (genre si je fais jouer mes joueurs à un jeu muet comme Signs ou à un truc sans MJ comme Fiasco je vais leur dire...).

    De même je ne vois pas trop pourquoi ranger mon enthousiasme au placard quand je veux présenter World Wide Wrestling (alors que je suis aussi enthousiaste devant des jeux plus classiques) et pourquoi valoriser les jeux courts aux règles simples (alors que je trouve que la simplification des mécaniques ludiques est une évolution qui ne me plait pas trop des jeux post-forgiens...genre pour Fall of Magic).
    Je vais même aller plus loin en disant que les réflexions sur l'accessibilité dans le mouvement dit "story-games" amène à des jeux que je trouve moins intéressants.

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  15. Franchement je m'en branle et surtout des susceptibilités de ceux qui trouvent que "mainstream" ou "tradi" est péjoratifs. Parce que c'est juste une excuse pour se montrer méfiant, jouer les offusqués alors qu'il y a pas de raison. Moi je joue au JDR et j'aime les jeux indies, narrativistes ou n'importe quel autre thème. D'abord parce que ça ouvre à d'autres publics (pas seulement le gros geek fan de WoW) et c'est énorme rien que pour ça.
    De mon côté je suis un vieux Rôliste alors finalement je reviens avec plaisir vers du tradi, parce que je sais où je vais et je peux même me permettre de maîtriser a D&D avec les outils de Dungeon World, de faire du Shadowrun en utilisant les aspects à la FATE ou autre. Et c'est cool.
    Ma démarche en faisant découvrir des nouveaux jeux n'est pas de convertir les fidèles à une nouvelle religion. Mais seulement de faire comprendre que le JDR est un média beaucoup plus vaste que ce que l'on pense.

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  16. Sinon sur la théorie et son usage comme repoussoir, j'ai toujours en tête son enterrement par Vincent Baker en 2015.
    http://www.story-games.com/forums/discussion/20273/the-big-model-rip

    Concrètement il propose de se passer des théories forgiennes négatives, celles qui disent que tel truc ne peut pas marcher, créé des "dysfonctionnements", pour préférer considérer qu'on est entré dans une phase où on a testé plein de façons alternatives de jouer au JDR et qu'il n'est plus nécessaire de mobiliser des outils pour rejeter d'autres façons de jouer.

    Clairement se poser en pourfendeur du "tradi" a pu avoir un intérêt créatif (créer des jeux dans l'optique de s'opposer à des façons de jouer qu'on aime pas cela marche bien) mais continuer à utiliser sans cohérence aucune le concept n'a plus grand intérêt (et nous pousse à ériger des barrières plus qu'à tenter des hybridations).
    story-games.com - The Big Model, RIP

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  17. Relisez-vous, clairement le mépris se trouve des deux côté de la barrière (barrière complétement artificielle, d'ailleurs).
    Je dis ça sans animosité, juste pour soutenir ma thèse que si on arrêtait de faire des catégories et qu'on considérait chaque jeu pour ce qu'il est (et éventuellement les jeux auxquels il ressemble), y a un risque qu'on baisse les clivages et les querelles de chapelles.

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  18. Gabriel Gnouchaton je n'ai vu personne ici avoir des propos méprisant envers l'une ou l'autre catégorie

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  19. Une chose sur le terme "jeu de rôle". Je comprends l'idée de renommer "jeux narratifs" ou "story games" des jeux de rôles innovants sous prétexte de rassurer la joueuse tradi/mainstream ou au moins d'éviter de le choquer ou de le faire entrer dans une guerre de définitions. Pour autant, et seulement pour citer mon ressenti personnel, je joue à des tas de jeux bizarres mais si j'ai le sentiment de faire du rôle, alors j'appelle ça un jeu de rôle. D'autant plus que lorsqu'il s'agit de jeux de ma conception, ils ont innervés par 25 ans de pratique du jeu de rôle, alors j'ai beau y jouer sans scénario, faire du jeu de basse, rompre la cohérence, jouer en vertige logique, tirer chaque situation sur une table, jouer sans stats, sans chiffre ou sans hasard, ou partager la narration comme un vil anarchiste, je fais toujours viscéralement du jeu de rôle et je pense que sans une expérience ou une explication de ce qu'est le jeu de rôle, j'échouerais à les jouer et à les transmettre. Et pareil quand je joue aux jeux des autres. Que je joue à Happy Together (un jeu sans lutte) ou à Yokai (un jeu sans MJ), je le fais foncièrement avec mon coeur de rôliste. Alors, à chaque fois que je vais en convention avec un nouveau jeu bizarre, je dis : "c'est un jeu de rôle, ça se passe dans tel univers, on va jouer tel type de personnage dans tel type de situation", et j'ai fait ça avec des centaines de personnes différentes, des toutes débutantes jusqu'aux vétéranes.

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  20. Doc Dandy : "Franchement je m'en branle et surtout des susceptibilités de ceux qui trouvent que "mainstream" ou "tradi" est péjoratifs. Parce que c'est juste une excuse pour se montrer méfiant, jouer les offusqués alors qu'il y a pas de raison."
    Pourtant, ça par exemple c'est méprisant.

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  21. Tiburce Guyard
    Le problème avec mainstream est presque le même qu’avec tradi :
    - cela parle d’une position économique ou sociale là où je voudrais parler du jeu en lui-même
    - cela place implicitement celui qui l’utilise dans une position d’hipster vegan avant-gardiste prétentieux.
    - c’est finalement extrêmement flou et trompeur car les jdr tradimainstream offrent une très grande variété – on ne sait donc pas à quoi s’attendre. (Et dire « il n’y aura pas de surprise » est tout de même dénigrer.)
    - cela confond trop souvent le jdr en tant que pratique, le jdr en tant qu’objet ludique et le jdr en tant (qu’objet commercial ?) (en tant que référentiel de transmission de l’objet ludique ?)(livre).

    Je trouve que j’ai une communication beaucoup plus efficace si je me contente de dire « ce jeu est comme ceci » sans le contraster avec d’autres, sans (risquer de) créer un clivage.

    Je suis heureux de voir que tu es aussi fan de l’approche « un petit jeu ». Moi aussi j’évite de dire « jdr », si on me pose la question je réponds en général factuellement et en laissant mon interlocuteur.trice juger. Après tout, chacun.e a droit a sa propre définition et je n’y ai pas d’enjeu. D'autres oui, je leur laisse, se disputer là dessus n'aides pas souvent à faire essayer un jeu. Par contre on peut en parler après. (Steve Jakoubovitch Thomas Munier)

    Confondre enthousiasme et fanatisme, explication et pilonnage, oui le danger est réel. Je l’ai vu trop de fois. J’essaye de rester toujours attentif à l’autre et de répondre au plus rapidement à ses questions, libre à cette personne de m’en poser d’autres si cela l’intéresse.


    Steve Jakoubovitch c’est d’ailleurs dans cette logique que j’aborde les aspects politiques, commerciaux, philosophiques, démarche de l’auteur.e, jdrologie, …

    Il n’est pas question de ranger son enthousiasme au placard, il est même essentiel. Seulement… ne pas écraser les pieds de son interlocuteur.trice en sautant sur place d’exaltation.

    Les jeux courts aux règles simples… effectivement je ne suis pas sûr que cela soit une bonne idée de les valoriser particulièrement. Par contre, c’est un biais personnel : je cherche un bon retour sur investissement de la complexité. Je n’ai plus ce plaisir de maitrise des mécanismes (encore moins de l’optimisation). Je suis d’accord avec toi qu’il est dommage d’appauvrir un jeu pour le rendre plus accessible. (Encore que la bonne vieille solution : kit d’initiation, règles de base, règles avancées…)

    Et le post de Baker sur l’aspect destructif de la Forge m’en a fait redécouvrir bien des aspects. Do your move but misdirect?

    Doc Dandy je parle de communication efficace et de limiter les clivages… je ne vois pas vraiment ce que s’en branler apporte à la choucroute. Pour moi c’est nier le problème, en plus d’être brutal et agressif. Mais si tu penses que je parle d’une approche inadéquate parce que j’ai posé mon diagnostic, je suis tout ouïe.

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  22. Je suis d'accord avec toi sur l'approche globale. Pas besoin de faire découvrir des jeux en leur collant des étiquettes qui, au mieux, passeront pour cryptiques, au pire pour des repoussoirs.
    Par contre se refuser à employer certains termes relève à mon sens du faux problème. Cette guéguerre est assez artificielle et si j'utilise le mot tradis, la plupart des rolistes comprend et ne va pas en faire un plat. Ce qui se sentent offusqués arrivent avec déjà des à-priori. Prendre des pincettes ne servira à rien, quoique tu fasses (ou que tu dises) tu passeras pour le bobo narrativo-vegan de service.

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  23. Dans ce sens là, dans le sens où il y a une partie du public qui est inatteignable, ou touchable uniquement avec des moyens disproportionnés, oui tu as entièrement raison.

    Pour les autres, ce n'est pas tant d'éviter d'employer certains termes que de privilégier une première communication efficace et courtoise. Après je les sors volontiers (enfin, pas tradi) pour le "et plus si affinités".

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  24. Gherhartd Sildoenfein Oui, voilà, en fait je suis un adepte de make your move but misdirect, je joue trop à AW :)

    Plus sérieusement, je rebondis sur deux points:
    - L'aspect économique est important. Il ne faut pas se leurrer: les jdr tradi demeurent tradi parce qu'ils se vendent et que du coup les éditeurs tradis veulent ne pas sortir des sentiers battus pour ne pas perdre leurs parts de marché. Trop risqué. Après sans doute que le marché étant ce qu'il est (je n'ai pas les chiffres hein), ils ont sans doute raison et que prendre le risque, c'est planter la boite.
    - C'est amusant comme il n'existe que deux positionnements: soit tradi soit hipster avant-gardiste narrativo-vegan élististe ascendant méprisant biclassé fanatique. Ce qui parvient à être méprisant envers l'ensemble des rôlistes, non? On est un animal plus complexe que cela, vous ne pensez pas? J'ai l'impression que les guéguerres et les flamewars dès que le terme narrativiste émergeait sont plus ou moins éteintes. Qu'après un rejet en bloc et des maladresses de communication, les "deux" camps peuvent enfin entamer un dialogue apaisé, ce qui amène une hétérogénéisation des pratiques (et oui, j'invente des mots parce que je le vaux bien).

    Ce dernier point est important parce qu'à mes yeux, quel que soit le terme qu'on utilise, il y a un vrai effort à faire pour accueillir tout le monde. J'ai l'impression en tout cas qu'avec la geekification de la culture mainstream, de plus en plus poussée grâce aux séries télé, aux films de super-héros, aux jeux vidéo, à la fantasy et à la SF devenues plus accessibles, qu'avec les vidéos du Joueur du Grenier, qu'on aime ou qu'on aime pas, il y a un intérêt pour le jdr et un flux entrant de nouveaux joueurs.

    Et c'est là où il faut pas se rater parce qu'il en va de l'avenir de notre loisir, qui peut se développer ou demeurer un loisir de niche. Il faut sortir de la vision qu'ont encore certains d'être des victimes, pourchassés par Mireille Dumas, que le jdr a mauvaise presse. Il faut être capable de donner envie de jouer au jdr sans avoir un discours de théoriciens en jdrologie que le nouveau venu risque quand même fortement d'en avoir rien à foutre.

    La culture du gaming est en pleine croissance et il faut faire découvrir. Faire attention aux barrières mentales qui se dressent face au prosélytisme et respecter le fait qu'il existe plusieurs façons de jouer au jdr et qu'aucune n'est la bonne, la seule, l'unique. Qu'on fait partie de la même famille et qu'on a aucune raison de s'entre-déchirer.

    On joue, au final, c'est tout. Ca n'est qu'un jeu. Ca plaira à certains. Pas à d'autres. La Terre continuera de tourner.

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  25. Doc Dandy​ je ne suis pas d'accord avec toi.
    Si j'ai une voiture hybride ou électrique, est-ce que dire des autres qu'ils ont des voitures tradi n'est pas un poil méprisant ?
    Si je dis qu'ils ont des voitures à l'ancienne ce n'est guère mieux.
    Dire qu'ils ont des voitures mainstream n'a pas de sens.
    D'où mon insistance à demander qu'on parle de classique, ca signale qu'il existe autre chose sans porter de jugement de valeur.

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  26. A l'ancienne n'irait pas car c'est revendiqué par le mouvement OSR et c'est plus qu'éloigné de l'attitude "classique". Je n'arrive pas à voir en quoi le terme "tradi" serait méprisant. Cela traduit une transmission ancienne, pas un quelconque jugement sur la qualité.
    Ca l'est juste pour des gens qui ont suivi les débats de chapelle où trois quatres personnes ont employé le terme "tradis" avec "dysfonctionnels". Ils ont déjà fait un rapprochement et ce sont déjà crispé autour de cette notion.
    Je rejoins Tiburce Guyard . Tout cela n'est que construction artificielle et la pratique est très hétérogène. Et beaucoup hermétique qu'on veut bien nous le faire croire.

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  27. Jean-Michel GOT Forcément si tu ne prends pas un produit culturel, les termes utilisés ne vont pas fonctionner! :D
    C'est tellement mainstream la carotte, sérieux! Naaaan, tu devrais vraiment revenir à la bonne vieille patate tradi...

    Le terme de "classique" est pas mal ceci dit. Sauf que le problème est que sa définition est multiple (si je prends mon Larousse) et que notamment elle englobe ironiquement la notion de tradi:
    - Qui mérite d'appartenir à la culture générale et est enseigné dans des classes (par opposition à une œuvre ou à un auteur mineurs) ou qui a atteint une notoriété telle qu'il sert de référence dans son genre : Connaître ses auteurs classiques. L'ouvrage de ce médecin est devenu classique.
    - Qui appartient à une grande tradition, par opposition à ce qui est marginal ou nouveau, moderne, etc. : C'est là une théorie classique.
    - Qui est conforme aux usages établis, au goût traditionnel : Un costume de coupe classique et sobre.

    Mais quelque part, peu importe: jamais personne ne va employer le terme de "classique". Tradi est passé dans le langage pour parler d'une certaine façon de jouer, même si c'est appliqué au jugé et qu'on voit que la pratique tradi est plus hétérogène, et par opposition à une autre façon de jouer, elle aussi définie vaguement et sans distinguer là aussi les différents courants en son sein.
    De plus, il existe une façon de jouer plus ancienne qui n'est pas pour autant la façon tradi... et je ne pense pas qu'ils apprécient si du coup on les nomme les "antiques".

    Je ne sais pas si le mieux ne serait pas si on a besoin de parler d'un style de jeu tradi, de dire que c'est la façon de jouer la plus répandue ou la plus usuelle. Qu'en comparaison, le courant narrativo-vegan demeure plus marginal. Les termes sont neutres. Et faire l'effort d'une périphrase permet à mon sens d'être un peu plus clair et sans doute plus accessible aux néophytes.

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